Filière Agro Sylvo Pastorale : La FIKOM se transforme en SIAEL en 2023

L’Association pour le Développement du Monde Rural (ADMR) organise depuis 2014 la foire internationale agro-sylvo-pastorale de Komsilga (FIKOM). La dernière édition tenue en novembre 2021 a connu des mutations dont le changement majeur est la transformation de la FIKOM en Salon International de l’Agriculture et de l’Élevage (SIAEL).(FIKOM).

Une équipe de la rédaction de www.lessentiels.net  a rencontré le secrétaire exécutif de l’ADMR, Jean Victor Ouédraogo pour plus de précisions. Lisez!!!

www.lessentiels.net : Présentez-nous votre structure, l’ADMR.

JVO : Je voudrais avant tout propos vous remercier pour l’occasion que vous, hommes de médias, offrez à ma modeste personne pour mettre encore en lumière une des multiples activités que l’Association pour le Développement du Monde Rural (ADMR) mène. Je voudrais en tant que Secrétaire Exécutif de l’ADMR dire que notre association est née du constat que les efforts déployés par nos braves paysans et nos gouvernants méritent d’être appuyés et encouragés par d’autres forces vives de notre pays.
Il convient de rappeler que le monde rural burkinabè regroupe plus de 80 % de notre population. Et tous, nous sommes d’une manière ou d’une autre dépendants du monde rural qui produit l’essentiel de ce que nous consommons.
Aussi, il ne fait l’objet d’aucun doute que le monde rural demeure un pilier fondamental de notre développement économique et social. C’est pourquoi, nous avons créé cette association pour apporter notre modeste contribution à la promotion du monde rural. Elle a été reconnue par les autorités compétentes depuis 1997. L’ADMR compte à ce jour plus de 1000 membres composés d’agriculteurs, d’éleveurs, de transformateurs de produits agricoles, de chercheurs, de groupements masculins et féminins, d’environnementalistes, de commerçants, d’ouvriers et de travailleurs des administrations publique et privée, etc. Son siège social est à Komsilga, dans la province du Kadiogo.

Qu’est-ce qui vous a motivé à créer la Foire Internationale Agro Sylvo Pastorale de Komsilga (FIKOM) ?

La FIKOM faut-il le rappeler, tire son essence de l’objectif fondamental de l’ADMR, c’est-à-dire faire la promotion du monde rural en appuyant les acteurs en matière d’équipements, d’intrants agricoles, de protection de l’environnement, et de renforcement des capacités. Aussi, apportons nous des appuis techniques divers visant à rentabiliser davantage les productions et les transformations en offrant aux producteurs des possibilités de partage d’expériences et de mutualisation, en créant des espaces d’écoulement des productions, etc. Dès lors, la symbiose se crée avec les acteurs. C’est pourquoi, l’ADMR a pu capter une initiative paysanne d’exposition des productions pour en faire une Foire Internationale au profit des acteurs du monde rural. La FIKOM permet aux acteurs du monde rural d’échanger sur 3 aspects du développement du monde rural à savoir la production, la transformation et surtout l’épineuse question de l’’écoulement des produits agrosylvopastoraux.

Quel Bilan pouvez-vous faire des éditions passées de la FIKOM ?

Appréciez vous-même. D’abord, la Foire a grandi d’édition en édition pour offrir beaucoup plus de possibilités aux acteurs du monde rural. Ensuite les échanges entre les services techniques et les producteurs, d’une part et entre les acteurs des différentes filières, d’autre part se sont renforcés et ont favorisé des transferts de technologies. Le plus important est la prise de conscience de la jeunesse sur le fait que le secteur agro-sylvo-pastoral offre d’énormes possibilités d’emplois et constitue une alternative au chômage et partant au développement économique et social du pays. Nous notons avec beaucoup de satisfaction l’intérêt de plus en plus grandissant des autorités du pays pour le développement du monde rural et en faveur de nos initiatives.

À la 1ère édition, nous étions à 16 stands et à la 6ème édition nous étions à plus de 200. Toutes les 13 régions ont toujours été représentées. Des pays comme le Mali, le Niger, la Côte d’Ivoire ont toujours participé à la FIKOM. La diversification remarquée des produits exposés, l’implication du secteur privé dans l’organisation et aussi celle des services techniques des ministères en charge de l’agriculture, de l’élevage et de l’environnement aux différentes éditions sont à considérer comme des acquis importants. Pour l’édition 2021, vingt (20) acteurs du monde rural ont vu leurs efforts récompensés dont la diaspora Burkinabé. Grace au soutien de nos partenaires, les récompenses ont été de taille à savoir 3 parcelles de 300 mètres carré d’une valeur de 5 millions chacune. Outre ces récompenses, les lauréats sont repartis avec des trophées, des enveloppes financières, des équipements agricoles. Sur le plan administratif, les ministères en charge du développement rural se sont engagés à décorer les lauréats à chaque édition et dans les différentes catégories. L’Assemblée Nationale s’est engagée à accompagner la FIKOM à chaque édition. La Mairie de Komsilga a aussi promis un espace qui sera désormais le site de la foire et un terrain qui va accueillir le siège de l’ADMR. Nous invitons les partenaires techniques et financiers du Burkina Faso à accompagner cette initiative qui est une émanation des acteurs du monde rural. C’est devenu un rendez-vous des acteurs du monde rural. Pour la première fois au Burkina, une structure comme l’ADMR, innove en mettant en place une compétition dénommée trophées des acteurs du monde rural. En 2023, nous introduirons des innovations à travers le « Kûuri d’Or » d’argent et de bronze. Kûuri signifiant daba en langue moré.

Pourquoi la FIKOM change-t-il de dénomination ?

Toute organisation qui se veut ambitieuse est appelée à se donner des moments de pause pour faire un bilan sur le chemin parcouru. Après donc six éditions, le bilan que nous évoquions tantôt nous a conduit à la nécessité de réajuster certains aspects. Les recommandations des acteurs nous orientent vers un format plus adapté à l’envergure nouvelle que nous voulons donner à la FIKOM. Ainsi, le comité d’organisation après avoir analysé ces recommandations et s’être renseigné sur l’expérience d’autres structures aux missions similaires à opté de passer de la FIKOM au Salon International de l’Agriculture et de l’Élevage (SIAEL).
Le SIAEL vise à :
– Accélérer le processus de professionnalisation des acteurs du monde rural,
– Donner plus de visibilité à toutes les chaines de valeur dans l’agriculture, l’élevage et l’environnement,
– Mettre en valeur l’interdépendance et susciter la compétitivité entre les différents secteurs socioprofessionnels du monde rural,
– Assurer plus d’engagement et de réussite aux jeunes et aux femmes dans les secteurs productifs,
– Susciter un partenariat mondial pour le développement du monde rural au regard des risques climatiques et sécuritaires qui se posent à ce monde.
Vous avez aimé la FIKOM, vous aimerez davantage le SIAEL.
Rendez-vous en 2023.

Quels sont les perspectives pour l’évènement ?

Pour la mise en œuvre du SIAEL il y a quatre (04) actions majeures qui s’imposent au Secrétariat Exécutif de l’ADMR.
D’abord, il s’agira de se mettre en règle vis-à-vis de l’administration en acquérant une nouvelle autorisation pour la prochaine édition qui sera une première avec le statut de salon.
La deuxième action à mettre en œuvre, c’est de créer une administration équipée conséquemment pour le Salon.
La troisième sera de mobiliser le maximum de participants avec un ferme espoir que les crises sécuritaire et sanitaire prendront bientôt fin.
La quatrième action importante est celle de réussir une connexion entre les lauréats et les décorations lors de la journée nationale du paysan. Nous entrevoyons de faire de l’appui conseil au profit des lauréats en collaboration avec les départements en charge du développement du monde rural.

Pouvez-vous nous parler des difficultés que vous rencontrez dans l’organisation de la FIKOM ?

Effectivement, comme toute organisation, nous rencontrons des difficultés dans l’organisation de la FIKOM. Au nombre de ces difficultés, nous pouvons citer entre autres l’insuffisance des soutiens financiers, l’insuffisance de la logistique et des moyens roulants. Également, il faut tenir compte de ceux qui « Volent » les idées.

Qu’attendez-vous de nos dirigeants quand on sait que la question rurale constitue une des priorités du chef de l’Etat?

L’ADMR attend beaucoup de nos dirigeants actuels. Voyez-vous, toute transition politique est un moment de prise de décisions importantes et parfois révolutionnaires. Depuis la réforme agraire et foncière, les lois n’ont jamais véritablement sécurisé et la terre et celui qui n’a qu’elle comme richesse c’est-à-dire le paysan. Il faut donc que les autorités approchent les acteurs du monde rural, les écoutent et prennent avec eux des décisions majeures sous forme de lois et décrets afin que le monde rural survive aux changements économique, politique, sécuritaire et climatique.

Il est certain que beaucoup de vos membres sont touchés par l’insécurité et ont dû abandonner leurs terres et leurs principales activités. Que pense faire l’ADMR au profit de ces PDI?

En effet parmi les 1millions 900 mille déplacés internes que dénombre actuellement le CONASUR, plus de 90 % n’avaient pour seul métier que l’agriculture, l’élevage ou la transformation des produits forestiers non ligneux.
Aujourd’hui, il faut le dire, leur avenir est en passe d’être compromis si rien n’est fait pour les accompagner. A l’ADMR, nous envisageons un accompagnement des PDI dans le but de les aider à changer de métier mais toujours dans la chaîne de valeurs de l’agrosylvopastoralisme. Par exemple, on peut aider les hommes et les femmes PDI à se former et à s’équiper pour la transformation des produits locaux ou à faire du jardinage périurbain, ou produire des semences dans des espaces plus réduits négociés auprès des autorités locales d’accueil.
Nous sommes en train de réfléchir sur ce programme et souhaitons vivement que les partenaires nous accompagnent dans son élaboration et dans sa mise en œuvre.

La promotion immobilière est aujourd’hui une question centrale et récurrente. Est-ce qu’elle touche le monde rural ?

Oui, les promoteurs immobiliers négocient et obtiennent de grands espaces pour réaliser des projets d’habitation. A y voir de près, l’action des promoteurs immobiliers est à la fois bonne et dangereuse pour l’avenir du monde rural. Bonne parce que, dans le processus irréversible d’urbanisation que nous vivons, les actions d’aménagement menées par ceux-ci sont salutaires car elles assurent une habitation décente et l’accès plus rapide à l’électricité, à l’eau et à l’assainissement.
Elle est dangereuse parce que, dans les communes rurales où se pratique encore l’agriculture, ce sont souvent de bonnes terres qui sont retirées des paysans pour faire des parcelles d’habitation. Et la présence des promoteurs immobiliers suscite une vive spéculation foncière qui accélère la disparition des terres agricoles.
Comme je le disais plus haut, il faut que des décisions majeures et stratégiques soient prises pour assurer une urbanisation responsable favorable à la survie des acteurs du monde rural.

On parle également de l’agrobusiness. Quelle est la position de l’ADMR face à ce sujet ?

L’agrobusiness est pratiqué de manière anarchique dans notre pays. Ce qui devait être un axe de promotion de l’agriculture moderne, intensive et créatrice d’emplois est devenu un phénomène d’expropriation des paysans qui n’ont plus de terre pour travailler et n’ont pas d’autres activités pour survivre.
En outre, si vous êtes un fin observateur, vous constaterez avec moi que les communes périphériques comme Pabré, Koubri, Tanghin-Dassouri, Saaba, Komsilga, etc dont les paysans très actifs approvisionnaient Ouaga en produits agricoles, pastoraux et de la forêt ne sont plus que l’ombre d’elles-mêmes en la matière. La cause est que les paysans ont vendu leurs terres aux riches qui y pratiquent le plus souvent des productions de luxe où parfois n’y produisent rien du tout.
A l’ADMR, nous envisageons des actions de plaidoyer afin de créer une symbiose entre les agrobusiness men et les paysans pour que les terres continuent d’être productives au grand bonheur de tous.
Je voudrais noter que les agrobusiness men comme les promoteurs immobiliers sont considérés comme des partenaires stratégiques de l’ADMR. Les premiers qui utilisent des techniques de production plus avancées peuvent former et épauler les producteurs sans moyens.
Les seconds peuvent apporter un appui financier à l’équipement rural.

Votre mot de fin ?
Je termine en remerciant toutes les organisations nationales et internationales qui nous ont toujours apporté leurs appuis technique et financier. J’espère vivement qu’ils vont encore nous accompagner dans les différentes éditions du Salon International de l’agriculture et de l’élevage.

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