La date du lundi 11 octobre 2021 restera gravée dans les esprits des burkinabè assoiffés de la justice. Pour cause, le procès historique Thomas Sankara et 12 de ses compagnons a enfin débuté au tribunal militaire de Ouagadougou, en présence de la veuve Mariam Sankara ainsi que les membres des familles des autres victimes. L’objectif commun c’est la manifestation de la vérité. Pour diverses raisons, le procès a été suspendu dans l’après –midi et reprendra le lundi 25 octobre 2021.
34 ans après l’assassinat du capitaine Thomas Sankara et compagnons, l’heure est enfin venue pour que toute la justice soit faite sur ce crime. C’est l’espoir que nourrissent les familles des victimes et de nombreux burkinabè de l’intérieur tout comme de l’extérieur, à travers cette première journée d’audience marquant l’ouverture officielle du procès qualifié d’historique. Au total, 14 personnes sont poursuivies dans cette affaire de coup d’Etat du 15 octobre 1987, qui a emporté le père de la révolution. Mais ce matin, il n’y avait que 12 personnes dans le box des accusés dont le général Gilbert Diendéré. L’ex président Blaise Compaoré, le présumé cerveau de l’assassinat, quant à lui, est toujours en exil en République de la Côte d’Ivoire avec son ancien aide de camp Hyacinthe Kafando, qui aurait également joué un rôle important dans cette forfaiture. Le tribunal leur a donné 10 jours pour comparaitre.
Dans le but de permettre à toute la population burkinabè de suivre convenablement le procès qui revêt d’une importance capitale, les avocats de la partie civile, notamment maître Séraphin Somé, maitre Prosper FARAMA et maître Hervé Kam, ont formulé une requête à l’endroit du tribunal, consistant à autoriser les enregistrements et ou les diffusions. Aussi, disent ces avocats, cela permettrait également d’avoir des archives judiciaires consistants et fiables car le greffe ne pouvant pas tout noter. Une requête que le parquet a jugé pertinent, mais qui malheureusement pose problème vu que l’article 43 du code de la justice militaire l’interdit.
Du côté de la défense, c’est un refus catégorique et elle considère l’idée de l’enregistrement comme étant une violation de la loi. « La loi dit qu’on n’enregistre pas les procès et j’ai demandé à ce qu’elle soit appliquée. La seule prise de notes que la loi prévoit c’est le greffe. Le tribunal n’a pas pour vocation de constituer des archives de l’histoire. Il ne faut pas se tromper sur l’objet du tribunal. Moi je refuse catégoriquement qu’on me filme ou qu’on m’enregistre pendant ma plaidoirie. Je ne veux pas entendre ma voix à la radio ou à la télévision », a fait savoir maître Moumouni Kopio de la défense. Toute la défense a donc rejeté en bloc cette requête d’enregistrement, indiquant que la presse pourrait donner une autre tournure à ce procès. Ainsi, le tribunal a pris acte, rejetant donc la doléance de la partie civile.
Comme requête venant de la défense, c’est le renvoi du procès demandé par maître Viviane Kaboré et maître Kanyili. Pour un dossier de 20 mille pages, elles disent l’avoir reçu seulement le 1er octobre dernier et par conséquent, n’ont pas pu prendre connaissance de tout le contenu. C’est pourquoi en accord avec tous les avocats des accusés, elles ont demandé un renvoi afin de mieux se préparer pour la défense de leurs clients. La partie civile et le parquet ne trouvant pas d’objections, le tribunal a suspendu l’audience du jour et la reprise est prévue pour le 25 octobre 2021. Ce report permettra aussi au tribunal de finaliser le chronogramme de passage des différents accusés et témoins à la barre.
Notons que dans la matinée, le tribunal a eu du mal avant d’avoir les juges militaires accesseurs, car la plupart des généraux tirés au sort ont désisté, indiquant avoir des liens d’amitié et de collaboration avec certains des accusés.
Michel CABORE