Validation terminologique au Burkina Faso : acquis et limites

DIALLO Asséta, Chargé de recherche

Institut des sciences des sociétés (INSS)

Centre national de la recherche scientifique et technologique (CNRST)/ Burkina- Faso

assetadiallo1@hotmail.fr

 

YOUL Palé Sié Innocent Romain, Chargé de recherche

Institut des sciences des sociétés (INSS)

Centre national de la recherche scientifique et technologique (CNRST)/ Burkina- Faso

romainyp@yahoo.fr

 

Résumé

Au Burkina Faso, les résultats de certaines recherches (productions de textes, écriture de roman, recherches terminologiques) doivent systématiquement être soumis pour validation à la commission nationale des langues burkinabè. Le constat est que cela ne se passe pas du tout ou ne se passe pas comme il se doit. L’objectif visé dans ce travail est d’apprécier l’activité de normalisation au Burkina Faso à travers les missions de la commission nationale des langues burkinabè.

Mots-clés : normalisation, validation, terminologique, Burkina Faso

Introduction

Au Burkina Faso les langues nationales sont utilisées dans les enseignements/apprentissages. A cet effet, de nombreux travaux ont été réalisés sur les langues nationales du pays. De la conception des grammaires, des recherches terminologiques à la conception de manuels scolaires. Ce sont autant de documents disponibles et utilisés dans les écoles primaires bilingues, les centres d’éducation de base non formelle et les centres d’alphabétisation. Ces travaux sont pour la plupart du temps l’œuvre des particuliers et des organisations non étatiques. Bien que d’une richesse inestimable, ces écrits présentent des insuffisances à plusieurs niveaux. Ces dernières sont imputables au processus de validation auquel chaque production doit être soumise avant sa vulgarisation. Pour A. DIALLO (2021 : 260) : « des cas d’équivalences inappropriés, de synonymes inadéquats, de confusion entre synonymie et variation sont rencontrés dans de nombreuses productions terminologiques. Le non-respect du volet normalisation terminologique est l’un des facteurs à la base des difficultés énumérées ».

Le présent article se questionne sur comment est organisée l’activité de normalisation au Burkina Faso ?

L’objectif visé dans ce travail est d’apprécier l’activité de normalisation au Burkina Faso à travers les missions de la commission nationale des langues burkinabè.

Méthodologie / Matériel et Méthodes 

La méthodologie adoptée dans la réalisation de ce travail comporte les étapes suivantes : la recherche documentaire, la collecte de données sur le terrain, le traitement et l’analyse des données.

La majorité des données utilisées est constituée de textes administratifs en rapport avec la question. Les enquêtes de terrain ont essentiellement ciblé des sous-commissions de langues afin d’avoir des informations fiables sur les pratiques de normalisation. L’ensemble des informations recueillies a fait l’objet de traitement dans un seul fichier. Puis les données ont étés analysées.

Avant tout développement, il est important de proposer des définitions aux concepts de terminologie et de normalisation. Cette clarification conceptuelle permet de se faire une idée sur l’orientation des concepts utilisés dans le présent travail. C’est aussi un moyen d’éviter les ambiguïtés et de faciliter la compréhension du travail.

La normalisation : Pour G. Rondeau (1983), la normalisation se positionne non seulement comme le gardien de l’intégrité des notions, mais aussi elle participe à la clarté et à la précision de ces dernières en écartant tout risque d’ambiguïté. La normalisation terminologique s’attaque au problème de la synonymie inutile afin de minimiser tout risque de perte d’information. Ce passage montre combien la normalisation est indispensable dans la mise en place de terminologies sérieuses à même d’être utilisées dans la production et la distribution du savoir.

La terminologie : pour S. PAVEL et al. (2001 : XVII) : 

« Dans sa première acception, le mot terminologie signifie un ensemble de mots techniques appartenant à une science, un art, un auteur ou un groupe social », par exemple, la terminologie de la médecine ou la terminologie des informaticiens. Pris dans un sens plus restreint ou plus spécialisé, le même terme désigne une discipline linguistique consacrée à l’étude scientifique des concepts et des termes en usage dans les langues de spécialité. Si la langue commune est celle dont on se sert dans le quotidien, la langue spécialisée est celle de la communication sans ambiguïté dans un domaine particulier du savoir ou de la pratique, basée sur un vocabulaire et des usages linguistiques qui lui sont propres ».

La terminologie est l’ensemble des termes propres à un domaine technique, de connaissance bien donné. Nous pouvons ajouter que c’est le vocabulaire technique utilisé par des praticiens d’un métier, d’un domaine scientifique ou technique ou de connaissance.

2. Résultats

Les résultats du présent travail se présentent sous deux points : les acquis de la pratique de normalisation au Burkina Faso et les difficultés auxquelles cette activité est confrontée.

Les acquis

Nous présentons sous forme de tableau les points fort de l’activité de normalisation terminologique au Burkina Faso. C’est un tableau de deux colonnes présentant d’un côté les acquis et de l’autre les commentaires qui y sont liés.

Acquis : Mise en place d’une commission nationale des langues burkinabè.

Commentaires

Commission Nationale des Langues Burkinabè à travers ses différentes sous-commission. Cette institution est sous le couvert du Ministère de l’Education Nationale et de Promotion des Langues Nationales. La place qu’occupe cette commission dans l’univers linguistique burkinabè est largement perceptible à la lecture des missions qui lui sont assignées. Ces missions se déclinent comme suit :

– encourager et coordonner les études sur les langues voltaïques (burkinabè);

– se prononcer sur la valeur des textes établis dans les différentes langues voltaïques ;

– contribuer à la définition des vocabulaires de base et des syntaxes des langues voltaïques ;

– codifier les systèmes de transcription et de grammaire des langues voltaïques, etc.

Acquis : Autonomisation des sous-commissions de langues

Commentaires : On dénombre trente et six (36) sous-commissions selon une liste datant de février 2017 ; chacune d’elle est responsable d’une langue bien donnée. En tant qu’organes exécutifs de la commission nationale, les sous-commissions ont pour missions de :

– faire des recherches dans les langues ;

– procéder à la vulgarisation des recherches ;

– apporter un appui technique à tous ceux qui en ont besoin.

Les sous-commissions jouent leurs rôles en produisant des connaissances sur les langues (documents oraux et écrits) ; organisation d’activités culturelles et de formation ; animation des journées dédiées aux langues nationales, etc.

Certaines sous-commissions regorgent de personnes ressources dans plusieurs domaines, surtout dans le domaine de la linguistique.

 

Acquis : Validation de documents

Commentaires : Au regard de l’importance de ce point, nous l’avons détaché de celui des sous-commissions. Seules instances habilitées à valider les productions en langues nationales, les sous-commissions à travers des invitations prennent part à des ateliers de validation.

N.B. : Les trois dernières missions de la commission vont en droite ligne des activités qui participent à la normalisation.

Difficultés

Les difficultés liées à la validation sont un frein au développement des recherches en langues nationales. Ces difficultés participent aussi à l’appauvrissement des vocabulaires. Présentons sous forme de tableau les difficultés recensées.

Difficultés : Ignorance des textes

Commentaires : L’ignorance des textes est perçue que ce soit du côté des sous-commissions ou que ce soit de celui des auteurs.

Difficulté : Manque de moyens

Commentaires : La plupart des sous-commissions manquent de moyens financiers et aussi de personnes ayant des compétences dans les langues nationales pour mener à bien leurs missions.

Ces difficultés combinées entrainent les pratiques suivantes en matière de validation des écrits :

– il ressort que l’équipe de conception se joint les services d’une personne membre de la sous-commission dès le début de la recherche des termes. Cette personne est donc chargée de valider au fur et à mesure toutes les terminologies ;

– de nombreux auteurs diffusent directement les résultats de leurs recherches sans aucun contrôle, vérification ou validation de la part des membres de la sous-commission.

Ces pratiques sont à l’origine de nombreux problèmes rencontrés par les utilisateurs sur le terrain.

Conclusion

Pour être plus performant et jouer un rôle déterminant dans l’acquisition et la distribution des connaissances scientifiques, les langues nationales doivent recevoir toute l’attention nécessaire. Cette attention doit provenir aussi bien de l’Etat burkinabè que des auteurs des écrits en langue nationale. Dans ce travail, il ressort que l’institution en charge de cette régulation est la commission nationale des langues du Burkina Faso. Cette dernière, sur le terrain, n’est pas à l’abri d’énormes difficultés qui sapent les efforts de recherche dans le domaine validation et de vulgarisation des résultats.

Références bibliographiques 

DIALLO Asséta (2021). Analyse critique de l’activité de normalisation terminologique au Burkina Faso : cas du fulfulde et du dioula, Les Éditions LABODYLCAL Laboratoire de Dynamique des Langues et Culture à Calavi, pp. 259-271

Ministre de l’Education Nationale, de la Jeunesse et des Sports. (1969). Décret n°69/012/pres/instituant une commission nationale des langues voltaïques, Burkina Faso

PAVEL, Silvia et al. (2001). Précis de terminologie. Bureau de la traduction. Travaux publics et services gouvernementaux. Canada. 153 p.

Rondeau, Guy. (1983). Introduction à la terminologie. Deuxième édition. Editeur gaëtan morin, Québec Canada, 238p.

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